Chères lectrices et chers lecteurs, que répondez-vous à la question: «Comment ça va?» Moi? «Bof.» Atteinte d’une «Zoomite» aigüe, je suis au bout de mon inspiration pour mettre de la magie dans ce 455e jour de la marmotte: jogging, café, Zoom, courriels, appels, Zoom, Zoom, Zoom, dire non aux enfants qui veulent aller «chiller» avec leurs amis, préparer le souper, manger, télé, dodo. Tout ça entre deux «vidages» de lave-vaisselle.

L’autre jour, lors d’une rencontre virtuelle avec mes amies, on se demandait à quoi on avait hâte en ce moment, concrètement – à part l’après-pandémie, bien sûr. Les projets à court et à moyen termes étant un mirage, ça laisse peu de choses auxquelles s’accrocher un jour de pluie. On ne peut même pas envisager d’être dehors avec ses amis ou espérer se retrouver sur la terrasse de notre resto préféré. Et on s’entend que relativiser les choses a ses limites. On a beau se dire qu’on a un toit, qu’on est en santé et qu’on ne vit pas au Tigré, notre vie n’est pas remplie de joie pour autant.

Vous avez peut-être vu passer vous aussi l’article du New York Times (NYT) intitulé «There’s a Name for the Blah You’re Feeling: It’s Called Languishing». Son auteur, le psychologue Adam Grant, parle justement de cet état, que le psychologue Corey Keyes a brillamment appelé languishing. La définition: vivre dans une situation désagréable ou indésirable pendant une longue période, ce qui provoque un état de stagnation et un sentiment de vide intérieur.

En psychologie, la santé mentale s’évalue sur un spectre allant de la dépression à l’épanouissement. Le languishing est la phase intermédiaire, l’entre-deux qui correspond à l’absence de bien-être.

L’adrénaline provoquée par le sentiment d’urgence dans laquelle nous étions au printemps 2020 a sournoisement cédé sa place à la fatigue. Notre appétit pour les projets diminue tout doucement, sans qu’on s’en rende compte. Parce que tout est devenu plus compliqué: louer un chalet (allô, les prix exorbitants!), acheter un vélo (il n’y en a plus aucun en ville!), faire des rénos (le prix des matériaux a triplé, et bonne chance pour trouver des ouvriers!). Nous sommes une méchante gang à être las. Et cet état est devenu la norme. Mais le fait de ne pas être déprimé ne signifie pas qu’on ne lutte pas. Et le fait de ne pas être épuisé ne veut pas dire qu’on déborde d’énergie. Le moins qu’on puisse dire, c’est que collectivement, on ne pète pas le feu.

Les psychologues trouvent que l’une des meilleures stratégies pour gérer les émotions est de les nommer. Donc, la prochaine fois qu’on me posera la question: «Comment ça va?», ma réponse sera: «Je souffre de languishing. Et toi?»

Comment s’en sortir?

Comme l’état de languishing atténuerait notre motivation et perturberait notre capacité à nous concentrer, l’article du NYT nous donne deux pistes pour nous aider à nous sortir de cette spirale:
1. Se donner du temps sans être interrompu, et le plus souvent possible. Par exemple, bloquer des plages de deux heures dans notre agenda, enfermé dans une pièce sans être dérangé, pour travailler sur un projet.
2. Se fixer des petits défis. Consacrer du temps tous les jours à une chose qui compte pour nous – une lecture intéressante, une conversation importante, une activité qu’on chérit.

Le numéro de juin d’ELLE Québec sera disponible jeudi 8 avril, en kiosque et en version numérique. Il aussi offert en abonnement.

ELLE QUÉBEC JUIN 2021

ELLE QUÉBEC JUIN 2021Carlos + Alyse

Photographie Carlos + Alyse. Stylisme Patrick Vimbor. Direction de création Annie Horth. Coiffure et maquillage Nicolas Blanchet. Production Estelle Gervais. Coordination Laura Malisan. Assistante au stylisme Laurence Labrie. Julie porte une combinaison, une ceinture et un collier Saint Laurent par Anthony Vaccarello.