Début juillet, mon avion se pose à Fairbanks, où mes parents m’attendent. Ginette et Ronald sont arrivés la veille, après avoir parcouru plus de 7 600 kilomètres en six semaines au volant d’une petite caravane de 17 pieds.

Le rendez-vous avait été fixé à cette date pour que nous puissions profiter des plus longues journées de l’année, soit près de 22 heures de clarté. Dès mon arrivée, j’ai l’occasion d’en faire l’expérience. À 2h du matin, une heure après le coucher du soleil et avant l’aube, le paysage baigne dans une douce lumière. Fascinant. Curieuse, je passerai ma deuxième nuit à lire et à prendre des photos heure par heure.

Sur la route de l’Alaska
Si mon voyage en Alaska commence à Fairbanks, un véritable périple dans l’État américain débute en fait au Yukon. Plus précisément à Carcross, au sud de Whitehorse, point de départ de la White Pass. Le chemin de fer construit pendant la ruée vers l’or offre une vue impressionnante sur les montagnes et les canyons. Il faut avoir le cœur bien accroché quand le train passe sur des ponts de bois à plus de 650 mètres d’altitude!

La route mène ensuite à Dawson City, le long du fleuve Yukon. En entrant dans la ville, on se sent projeté dans le passé, raconte Ginette. On s’attend presque à voir un cow-boy surgir d’entre les maisons sur les trottoirs de bois, en grande partie d’origine.

 

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Aventure dans le Nord
De Dawson City, trois choix sont possibles: se diriger vers Inuvik, au nord, traverser en Alaska à travers les montagnes par la Top of the World Highway ou revenir vers Whitehorse pour emprunter la route nationale. Poussés par le désir d’aller tremper un orteil dans la mer de Beaufort, Ginette et Ronald ont pris la route d’Inuvik. Le long de la piste, la forêt boréale cède peu à peu la place à la toundra. D’Inuvik, Ginette gardera un souvenir impérissable de sa visite sous terre dans un garde-manger traditionnel creusé à même le pergélisol.

La Top of the World Highway, qui frôle la cime des montagnes, compte parmi les attraits incontournables de ce coin de pays. Mais rares sont ceux qui s’y aventurent. La majorité des Québécois rencontrés dans les campings n’ont pas osé affronter la route non pavée très endommagée par les gels et dégels. Pourtant, Ginette et Ronald assurent que le paysage vaut largement les heures passées à se faire secouer et les tonnes de poussières ingurgitées.

Vue du mont McKinley
De Fairbanks, nous nous dirigeons vers le parc national de Denali. À moins de posséder une autorisation, la seule façon d’y circuler est de prendre la navette, dont on peut descendre à tout moment pour faire une randonnée. En scrutant les flancs des montagnes, nous distinguons un caribou, un ours et de nombreux points blancs qui se révèlent être des mouflons de Dall, des bêtes habituées à cet environnement aride. Le soleil qui fait de timides percées entre les nuages illumine le décor où se marient le vert tendre de la toundra, les teintes cuivrées de la terre, le gris des rochers et le blanc des cimes enneigées. J’ai rarement vu plus beau jeu de couleurs!

Caché par les nuages une journée sur trois, le mont McKinley nous apparaît dans toute sa splendeur à notre arrivée au village de Talkeetna, point de départ des expéditions sur le plus haut sommet d’Amérique du Nord. Mais la meilleure façon d’admirer le géant est de grimper dans un petit avion. La balade est un peu chère, mais extraordinaire: survol de la toundra, puis des montagnes dont les sommets s’enneigent graduellement à mesure qu’on s’approche du McKinley; aperçu des mers de glace et arrêt sur le glacier au pied du géant. Un de mes plus beaux souvenirs de voyage.

Croisière à Valdez
La route vers Valdez nous amène à près de 2 000 mètres d’altitude. Le brouillard est si dense qu’on ne voit pas à deux mètres. Au retour, le temps sera suffisamment dégagé pour nous permettre de constater que des plaques de neige continuent de s’accrocher au rebord de la route bien qu’on soit au début de juillet.

À Valdez, nous nous offrons une croisière d’une journée dans le golfe de l’Alaska. Dès le départ, nous croisons deux otaries qui prennent le soleil sur une bouée et un groupe de loutres. Nous ne pouvons nous empêcher de sourire en les voyant se chamailler et rouler l’une sur l’autre. Malheureusement, nous n’admirerons le glacier Columbia que de loin, le passage étant obstrué par des centaines de blocs de glace. Le spectacle du soleil frappant ceux-ci et leur donnant des reflets bleutés est cependant magnifique.

Un tour en ville
D’Anchorage, la ville la plus peuplée d’Alaska avec ses 273 000 habitants, je garde le souvenir de rues étonnamment fleuries pour une cité dite nordique. Mais quand on observe les plates-bandes municipales, on remarque que des choux et du persil partagent l’espace avec les fleurs. Autre curiosité: les kiosques alimentaires qui proposent des hot-dogs ou des gyros à la viande de renne.

À travers la montagne
Une journée en ville nous suffit. Nous prenons ensuite la route pour Seward. Comme la distance pour atteindre le village côtier est assez courte, nous nous permettons une brève croisière au glacier Portage. Cette fois, le bateau navigue à moins de 100 mètres du glacier, dont on entend distinctement les craquements. Nous disposons encore d’une partie de l’après-midi pour aller à Whittier. Excellente excuse pour emprunter l’Anton Anderson Memorial. Ce passage creusé à même le roc est le plus long tunnel combiné rail-route d’Amérique du Nord. Sa taille: 4,05 kilomètres.

 

Partie de pêche à Homer
Après une nuit à Seward, nous mettons le cap sur Homer, capitale du flétan, où mon père veut aller pêcher depuis que l’idée de ce voyage a germé dans nos têtes. La partie se révélera franchement amusante, quoique plutôt tranquille. Le flétan est un poisson peu combatif – peut-être à cause de l’eau froide! – qui mord facilement. Il nous faudra moins d’une heure pour attraper nos deux prises réglementaires. Deux par pêcheur, ça peut sembler peu, mais comme chacun de nos poissons pèse plus de 10 kilos, nous mangerons du flétan midi et soir pendant trois jours après avoir rempli le congélateur de la caravane.

Le passé russe de l’Alaska
La route de retour vers Anchorage nous fait traverser la péninsule de Kenaï. L’escale à Soldotna nous rappelle que l’Alaska était encore, il n’y a pas si longtemps, un territoire russe. On y trouve quelques églises et maisons à l’architecture typique.

Nous passons notre dernière nuit dans le parc national de la rivière Russe, paradis des pêcheurs de saumon. C’est ma dernière chance de croiser un ours avant de rentrer à Montréal. Pendant 15 jours, nous avons multiplié les détours sur le bord des rivières à saumon dans l’espoir de croiser des bêtes en quête de nourriture. Mais il semble que nous avions quelques jours d’avance sur elles. Je devrai finalement me contenter de marques de griffes fraîches sur un arbre!

Bon à savoir
Ceux qui pensent qu’il fait froid en Alaska se trompent. Les matins sont souvent un peu frais, mais il peut faire très chaud dans la journée, surtout en ville. Le fond de l’air a cependant tendance à se rafraîchir dans les montagnes et sur la mer. On pensera à apporter une veste ou un coupe-vent.

Les routes sont généralement en bon état. Leur petit nombre oblige cependant les voyageurs à revenir sur leurs pas pour visiter les villes côtières du sud de l’État. À moins qu’ils optent pour le traversier, qui relie plusieurs d’entre elles.

Dans le nord de l’Alaska, il fait si froid qu’il est impossible de laisser un véhicule éteint sans source de chaleur en hiver. Même les stationnements des centres commerciaux sont dotés de prises électriques!

Le 22 juin, jour du solstice d’été, le soleil ne descend pas en dessous de l’horizon dans les villes les plus au nord de l’État. On peut vivre plusieurs nuits de totale clarté autour de cette date. En hiver, au contraire, la nuit dure plus d’un mois. Le soleil se couche dans les dernières journées de novembre pour ne se relever qu’à la mi-janvier.

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