Cheveux rouge incendie noués à la base de la nuque, grand sourire qui illuminerait n’importe quelle pièce sombre, Gabrielle se connecte à la visio, éminemment heureuse de parler de musique… enfin. Pour la petite histoire, l’autrice-compositrice devait lancer son deuxième album tout juste avant la pandémie de 2020, mais certains détails de la production ont tardé, ce qui en a repoussé la sortie. Pour Gabrielle, ç’a été rien de moins qu’une bénédiction. Elle a profité de ce «moment de silence obligé» pour retomber en mode création.

«Pendant deux ans, j’ai exploré, j’ai essayé plein d’affaires, j’ai créé de la musique avec plein de monde, et je dois avouer que je me suis un peu perdue dans le processus. Je me suis demandé: “Qui suis-je maintenant?” Je suis sortie de ma zone de confort pour finalement mieux me retrouver.»

Ce qui la tarabiscotait, en réalité, c’est la pression implicite liée à ce deuxième album. Celui qui fait que «ça passe ou ça casse», celui qui confirme, en quelque sorte, qu’un ou une artiste est là pour rester.

La pièce Reminder To Breathe a d’ailleurs été écrite en réaction à l’idée de mener à bien ce second opus. «Cette toune, c’est moi qui croule sous la pression de faire un disque. J’y raconte une crise d’anxiété et je me répète: “Respire, Gabrielle, ça va être correct.”»

Ville de pluie

Le bout du tunnel

Cela dit, l’artiste demeure persuadée que de «créer un album, c’est une thérapie en soi». Et dans le cas qui l’occupe, ce processus lui a permis de se reconstruire à la suite d’une rupture marquante. «Oui, c’est un album de breakup, mais cette séparation n’est pas récente. C’est important de dire que j’écris toujours à retardement des événements. Quand je vis une émotion, je vais commencer une chanson, mais je ne pourrai pas la finir. Tu sais, quand tu es juste trop dedans et que tu ne vois pas le bout du tunnel? Ça me prend toujours un pas de recul [pour terminer mes chansons].»

Cette période de gestation lui a, entre autres, permis de pondre les touchantes et très personnelles pièces How We Used To Be (premier extrait de l’album) et Lately, qui abordent sans faux-fuyant la complexité de la fin d’une relation amoureuse. Et on s’y reconnaît toutes un peu, inévitablement.

«Quand j’écris mes chansons, je ne me demande pas si les gens vont connecter à mon histoire. Cela dit, quand ça arrive, quand quelqu’un me dit qu’il a l’impression que je raconte sa rupture amoureuse dans How We Used To Be, c’est alors ma plus grande victoire, parce qu’à ce moment précis, moi non plus, je ne me sens plus seule. Se sentir comprise par une chanson, il n’y a pas de meilleur sentiment.»

«À 75 ans, je ferai encore des tiny desks (concerts intimes) avec mes chums de filles pis nos guitares. Fuck la date de péremption.»

Ambition et bucket list

L’autrice-compositrice de 34 ans ne se gêne pas lorsque vient le temps d’aborder ses aspirations futures. Elle voit grand. «Il n’y a pas de limites à mes rêves. Je vise une carrière internationale et je l’assume. Les gens ont peur d’avoir de l’ambition parce que s’ils se fixent des objectifs et qu’ils ne les atteignent pas, ils s’inquiètent de ce qu’ils auront l’air aux yeux des autres. Moi, je suis crinquée, mais ça ne veut pas dire que j’y parviendrai demain matin. Je vais jouer de la musique toute ma vie; donc, j’ai encore du temps devant moi. À 75 ans, je ferai encore des tiny desks (concerts intimes) avec mes chums de filles pis nos guitares. Fuck la date de péremption.» Amen!

Et il y a quoi sur cette fameuse bucket list à court et à moyen termes?

«J’aimerais faire la première partie d’un band aux États-Unis et en Europe, et que ma musique voyage partout dans le monde!» 

Across The Room, Gabrielle Shonk, Arts & Crafts Productions. Offert le 24 février sur toutes les plateformes d’écoute en continu. 

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