Il est neuf heures du matin à Los Angeles. C’est l’heure de ma rencontre Zoom avec Charlize Theron. Sa voix est claire, pure, joyeuse. A-t-elle un sourire aux lèvres? Je ne le sais pas, puisque l’actrice préfère qu’on se parle à caméra fermée.  

Pour ses nombreux fans, Charlize Theron est l’incarnation de la beauté et de la féminité, transformée en déesse éthérée pour le parfum J’adore de Dior. Dans la nouvelle campagne Chronomat de Breitling, elle est une femme engagée – ce qui est très près de sa réalité. Aux côtés de la danseuse étoile afro-américaine Misty Copeland et de l’actrice chinoise Yao Chen, elles forment un trio de femmes de tête qui brisent les règles et déjouent les stéréotypes.

Depuis 2009, Charlize Theron est une ambassadrice respectée des Nations unies et une militante infatigable engagée dans les questions sociales. En 2007, elle a créé sa propre fondation, le Charlize Theron Outreach Project for Africa, qui soutient la jeunesse africaine dans la lutte contre le VIH/sida, notamment. L’année dernière, son organisation caritative a lancé Together for Her, une campagne mondiale contre la violence domestique, fléau qui a augmenté de manière significative pendant la pandémie. Theron défend également la communauté LGBTQIA+, ayant déclaré par le passé qu’elle ne se remarierait pas tant que le mariage homosexuel ne serait pas légalisé partout aux États-Unis. Elle s’est aussi exprimée pendant le mouvement #MeToo, révélant courageusement sur la National Public Radio qu’elle avait été harcelée sexuellement par un réalisateur il y a de ça quelques années.

 En matière de films, Theron est tout autant dans l’action. Elle casse la baraque dans Atomic Blonde (dont la suite a déjà été annoncée), dans Mad Max, Fury Road et dans Fast & Furious #9. Dans The Old Guard, elle incarne une immortelle stylée à la forme physique incroyable. Polyvalente, elle a aussi brillé dans des rôles plus exigeants, demandant parfois d’elle une transformation complète. En 2004, elle remporte un Oscar, un Golden Globe et un Ours d’argent pour son rôle dans Monster de Patty Jenkins, qui relate l’histoire de la tueuse en série Aileen Wuornos. À l’écran, l’actrice était méconnaissable, complètement changée. En 2018, elle a récidivé dans Tully de Jason Reitman, pour incarner une jeune mère: «Dans la quarantaine, les transformations physiques drastiques sont plus difficiles que dans la vingtaine, c’est certain!» En 2019, elle a joué dans le drame Bombshell, qu’elle a co-produit, pour lequel elle a été nommée de nouveau pour un Oscar. Bientôt, l’actrice se mettra dans la peau de Lady Lesso, la doyenne du Mal dans le conte de fées School for Good and Evil basé sur les romans éponymes de Soman Chainani et réalisé par Paul Feig pour Netflix (la sortie est prévue en 2022).

Aujourd’hui, à 48 ans, le plus grand rôle de Theron n’est pas à l’écran. Mère de famille, elle élève seule ses deux enfants adoptifs, Jackson, 9 ans, et August, 6 ans, avec une belle ouverture d’esprit. En 2019, elle s’est confiée à Jimmy Fallon sur The Tonight Show à propos de son aîné, qui est transgenre. «L’histoire de ma fille est la sienne, et un jour, si elle le veut, elle pourra la raconter (…) mais il est important pour moi que le bon pronom soit utilisé lorsqu’on en parle», a-t-elle expliqué. Bon sang! Il est 9h25. Son agent nous fait savoir discrètement que le temps qui nous est alloué arrive à sa fin. Je me lance.

ELLE: Tu es actrice, productrice, ambassadrice des Nations unies, militante au sein de ta propre association caritative et mère de deux enfants. Tu as avoué avoir quelques difficultés à concilier ta vie privée et ta vie professionnelle. As-tu depuis trouvé l’équilibre parfait?

CHARLIZE THERON: Je ne pense pas que la perfection puisse être atteinte! J’ai fait la paix avec ça. L’équilibre est une chose très délicate, surtout en tant que solo-parent, quel que soit le métier que vous avez, mais surtout quand vous devez voyager pour le travail. Ma vie est en évolution, mes enfants grandissent. Ils sont maintenant à un âge où ils ont des intérêts personnels et des trucs à faire après l’école! Je dois en prendre compte dans mes décisions.

ELLE: Comment as-tu vécu la pandémie?

CT: J’étais à Los Angeles, et maintenant que j’y repense, c’était un isolement assez facile. J’étais avec les personnes que j’aime le plus au monde: mes enfants et ma mère. On a eu le temps de se déposer, d’échanger, de passer des instants précieux ensemble. À cet égard, c’est un moment de ma vie que j’ai vraiment apprécié.

ELLE: Le rôle de prof’ à la maison t’a-t-il plu?

CT: Je n’étais pas fan de l’enseignement à domicile, et j’étais très consciente que c’était quelque chose pour lequel je n’étais pas douée! Il faudrait le demander à mes enfants. J’ai beaucoup pensé à mes filles, à comment elles vivaient cette crise. Je me souviens de l’impact de l’épidémie de sida en Afrique du Sud, alors que je n’avais même pas l’âge de ma fille aînée… Espérons que le plus fort de la pandémie est derrière nous.

Masha Maltasava

ELLE: Es-tu nerveuse à l’idée de retourner sur un plateau de tournage après deux ans d’absence? 

CT: Ces deux dernières années, je n’ai fait que travailler en préproduction et ç’a été passionnant. Je suis maintenant enthousiaste à l’idée de recommencer le tournage, mais je suis aussi hyper vigilante sur la façon dont je m’y prends. Je suis encore très prudente quant au virus; la pandémie n’est pas terminée. Avoir un peu de peur est intelligent, selon moi.

ELLE: Le calendrier des sorties de films a été chamboulé par la pandémie. Quels sont les projets qui t’attendent?

CT: Il y a bien sûr School of Good and Evil, qui sortira en 2022 sur Netflix, mais également deux ou trois choses qui sont secrètes pour l’instant. Ce sont des projets très excitants! C’est tout ce que je peux dire…

ELLE: Tu as joué dans 55 films et 6 séries en seulement 26 ans. Tu as reçu 18 nominations et gagné 3 prix. De quoi es-tu le plus fière?

CT: Je dirais… que je suis fière de la longévité de ma carrière. Pour tout acteur, c’est probablement la chose la plus importante. J’ai toujours su que j’aimais vraiment ce métier et je voulais essayer de l’exercer le plus longtemps possible. En tant que comédienne, ma plus grande crainte est qu’avec cette succession constante de nouveaux talents, les gens m’oublient. Quand j’étais plus jeune, l’idée de subvenir à mes besoins uniquement grâce au métier d’acteur, sans avoir un deuxième emploi pour payer les factures, était un véritable rêve! C’est difficile, dans le métier. Je suis fière des choses auxquelles j’ai dit « non ». Et je suis fière des choses auxquelles j’ai dit « oui ». C’est ce qui m’a mené à bâtir une longue carrière.

Masha Maltasava

ELLE: Quel est ton rapport au temps?

CT: Le temps est précieux. C’est la seule chose que l’on ne peut pas acheter. On ne sait pas, non plus, de combien de temps on dispose. Je le chéris, donc, mon temps.Quand j’étais plus jeune, je me sentais pressée par la vie. Maintenant, je ralentis et profite du temps que j’ai pour faire les choses qui comptent le plus pour moi, avec mes enfants et les gens que j’aime.

ELLE: Tu es membre de la nouvelle équipe d’ambassadrices Breitling, aux côtés de Misty Copeland et de Yao Chen, pour la montre Chronomat. Est-ce important pour toi de faire partie d’une communauté?

CT: Oui. C’est propre à la condition humaine, ce besoin, ce sentiment d’appartenance. Et on peut faire partie de plein de communautés différentes, qui nous soutiennent et nous acceptent – c’est la beauté de la chose. C’est important de sentir qu’on fait partie d’un tout.

ELLE: Comment a débuté cette collaboration avec Breitling?

CT: J’ai été approché alors qu’Adam Driver et Brad Pitt avaient déjà signé pour la première campagne – je suis une grande fan de ces deux-là! J’ai vraiment aimé le concept du projet. Il y avait une chimie entre Adam, Brad et moi, et une magie autour de ce que Peter Lindbergh avait imaginé, qui me semblaient être réelles et sincères. Cette société fabrique des montres depuis 1884 et a créé quelque chose qui était tout à fait dans l’air du temps.

ELLE: Qu’est-ce qui te plaît le plus dans la montre Chronomat de Breitling ?

CT: Nous ne vivons pas à une époque où nous sommes obligés de porter des montres, et Breitling l’a compris, et le design moderne de leurs bijoux est d’une intelligence impressionnante. Malgré ses aspects techniques actuels, la montre possède une élégance classique. Elle ne dicte ni le déroulement de votre journée ni ce que vous devez porter.

Masha Maltasava

ELLE: Tu es une véritable militante et tu te bats pour plusieurs causes, notamment l’inclusion, la diversité et la communauté LGBTQIA+. Tu as même créé ta propre fondation Charlize Theron Africa Outreach Project en 2007. Qu’est-ce qui t’a motivée à le faire?

CT: Je suis née et j’ai grandi en Afrique du Sud. Pendant mon adolescence, j’ai été très affectée par l’épidémie de sida qui a mis mon pays à genoux et qui, à bien des égards, le fait encore souffrir. J’ai vu énormément de personnes mourir. Ce que j’ai réalisé, lorsque le plus gros de la tempête était passé, dans les années 2000, c’est qu’il y avait de réelles lacunes en matière de prévention. Les traditions anciennes ont vraiment fait obstacle à la médecine moderne et on nuit à la compréhension de la propagation du virus. Et il n’y avait pas vraiment d’organisations qui se concentraient sur la prévention, c’est pourquoi j’ai voulu créer une fondation.

ELLE: Et quels sont les projets actuels de celle-ci?

CT: L’objectif du CTAOP a vraiment changé au cours des 15 dernières années. Au départ, son but était de combler ce vide en matière de soins préventifs, mais quand on commence à travailler dans ce domaine, on se rend vite compte que la lutte contre le sida est complexe et plurielle. Il faut l’envisager de manière holistique. Il y a tellement de facteurs à prendre en compte. Nous nous intéressons donc à l’engagement communautaire et à l’éducation, notamment à l’enseignement supérieur – et tous tâchons d’aider le plus de gens possible à y avoir accès. Nous recherchons vraiment des leaders positifs pour l’avenir – ce qui est important pour l’Afrique comme pour partout ailleurs.

ELLE: Dans le sillage de la pandémie mondiale, qu’est-ce qui a changé au sein de l’organisation?

CT: Ç’a ouvert une boîte de Pandore. Lorsque nous avons fait le point avec toutes les organisations que nous soutenons, le principal sujet qui nous est revenu est la violence sexiste. Les femmes et les jeunes filles sont celles qui souffrent le plus de cette crise sanitaire et elles passent trop souvent entre les mailles du filet. L’isolation pandémique a été salvatrice pour plusieurs, mais mortelle pour d’autres, qui vivaient avec des agresseurs. La COVID a décidément compliqué les choses, mais a aussi rapproché les communautés. Nous étions tous dans le même bateau. C’était plus facile de tendre la main et les gens avaient cette volonté de soutenir des organisations comme le CTAOP.

ELLE: Après une journée longue et chargée, comment te détends-tu?

CT: Parfois, je cours toute la journée, du matin au soir, et je finis par m’échouer dans mon lit aux petites heures, m’endormant en quelques secondes! Avec des enfants, on a peu de temps pour se reposer, s’asseoir, réfléchir. Quand j’arrive à avoir un moment pour moi, j’adore me retrouver avec mes amis autour d’un bon repas ou d’un verre de vin. C’est incroyablement relaxant et ça me met d’excellente humeur.

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