Mélanie est pharmacienne. Même si sa vie a été chamboulée depuis l’apparition du virus, elle demeure positive. Elle nous raconte ses journées à la pharmacie.

J’ai entendu parler de la COVID-19 pour la première fois en janvier, comme tout le monde. À l’époque, j’ai pensé qu’on allait devoir s’adapter et qu’on serait peut-être touchés si ça sortait de Chine, mais jamais je n’ai imaginé que ce serait si gros. Honnêtement, je ne l’ai pas vu venir.

Mon quotidien de pharmacienne a été totalement transformé ; aujourd’hui, c’est une autre réalité. Même si mon travail en tant que tel demeure le même, nous avons complètement réorganisé la pharmacie afin d’éviter que des clients circulent dans les allées. Dès qu’ils ouvrent la porte, ils se trouvent maintenant devant une table installée à deux mètres de l’entrée. Quelqu’un (équipé d’une visière, de gants et parfois d’un masque) les accueille et va chercher les produits dont ils ont besoin. Et entre chaque client, on jette nos gants et on se lave les mains.

Nous avons aussi instauré de nouveaux protocoles pour les prescriptions papier : le client doit glisser sa prescription dans un Ziploc qu’on lui tend, puis qui est désinfecté et photocopié. On travaille avec la photocopie, alors que l’original est placé en « quarantaine » dans une boîte pour quatre ou cinq jours avant d’être classé. Même nos postes de travail ont été repensés pour respecter la distance de deux mètres. Évidemment, toutes ces mesures ralentissent et compliquent notre tâche, mais elles sont importantes pour limiter la propagation.

La plupart des clients nous disent d’ailleurs à quel point ils se sentent en sécurité quand ils viennent à notre pharmacie, d’autant qu’on n’a pas de files d’attente. Et si certains médias ont fait état de cas de violence verbale envers des pharmaciens, pour ma part, je n’ai rien vécu du genre. En fait, une bonne partie de mes interactions se passe au téléphone, car nous conseillons aux clients de nous appeler s’ils ont des questions.

Malgré tout, je suis un peu stressée de savoir que je peux être exposée au virus. Je travaille beaucoup — je ne compte plus les heures ! — et c’est certain qu’avec la fatigue, l’inquiétude devient parfois plus présente. Je me demande : Est-ce que je fais assez attention ? Est-ce que les mesures qu’on a mises en place sont bonnes ? Est-ce que je me sens bien ? Oui ? Allez, on continue !

Certes, l’angoisse est là, mais elle ne prend pas le dessus au point de m’empêcher de faire mon travail. Afin de rester positive et de me changer les idées durant mes journées de congé, je cuisine, je vais marcher ou je regarde des films. Même si j’habite seule et que je ne peux voir personne, j’essaie de garder contact avec mes proches. Voir mes petits neveux par appel vidéo me fait beaucoup de bien et me donne l’énergie de continuer.

Oui, ça va durer un moment, mais pendant ce temps, on sauve des vies. C’est tout ce qui compte.

(Les noms ont été modifiés). Propos recueillis par Jessica Dostie.

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