Je vous ai déjà raconté la fois où, à la veille de remplacer Gino Chouinard à la barre de Salut Bonjour Weekend il y a plus de 10 ans, je m’étais armée d’une multitude de livres de psycho pop pour m’aider à comprendre comment devenir une bonne leader.

À 34 ans, c’était la première fois de ma carrière que je me voyais confier la tête d’une équipe, et j’étais f***ing intimidée. Je n’ai jamais ouvert ces livres, mais, sans que je le sache, l’humilité de ce geste me plaçait déjà sur la bonne voie.

Je ne me suis pas guérie. J’ai éprouvé depuis, à de nombreuses reprises, ce même effet de vertige à l’idée de devoir être aimée, respectée, reconnue par mes pairs, tout ça sans être crainte par eux et elles. Parce que régner par la terreur, ce qui n’est pas si rare dans le merveilleux monde où j’évolue, très peu pour moi, merci.

En parallèle avec cet ardent désir d’être outillée pour «mener» mes gangs me tenaille celui, moins avouable, d’être à la hauteur. À la hauteur des attentes des diffuseurs, des producteur.trice.s, des recherchistes (souvent plus brillant.e.s que ceux et celles qu’ils mettent si humblement en valeur) et, surtout, du public. Vous comprendrez comment, dernièrement, mon nouveau mandat à la radio d’ICI Première m’a plongée, une énième fois, dans le cercle vicieux de mes insécurités. Pas assez intelligente pour succéder aux brillantissimes Marie-France, Christiane et Catherine, trop populaire pour être crédible, pas assez «connaissante», trop culture pop, «pas assez toute» et «trop toute» à la fois.

Pour faire taire mes complexes, j’ai décidé de retourner à l’école cet été. Au moyen d’une publication Facebook, je suis partie à la recherche de professeur.e.s et de chercheur.euse.s en économie, philosophie, féminisme, philosophie, politique européenne et américaine, réalités autochtones… En clair, je me suis constitué une superbanque de mentors, de passeurs de savoir, de transmetteurs d’histoire. J’ai bu leurs paroles jusqu’à la lie, ils et elles m’ont insufflé confiance et assurance. J’étais assez fière de ma shot, jusqu’à ce qu’on me rapporte des propos entendus çà et là: «Mais pourquoi fait-elle ça? Elle ne devrait pas se montrer si vulnérable, c’est prêter flanc aux critiques!»

J’avoue avoir été étonnée… puis pas tant que ça. On a beau vanter les mérites de la société du savoir, affirmer haut et fort que l’éducation est une priorité et un bien commun essentiel, dans les faits, on n’estime pas tant que ça ce qui bonifie l’intelligence. Ces réactions m’ont déçue, tout en renforçant en moi l’idée que ces valeurs sont primordiales à mon évolution en tant que citoyenne; et c’est à ce titre que je m’assois tous les jours en studio. Devant la mer immense de tout ce que je ne sais pas, je suis passée, en quelques mois, de femme complexée à femme assumée.

Non, je n’ai pas toutes les connaissances et l’intelligence que je rêverais de posséder. Cependant, j’ai de la curiosité à revendre, de l’enthousiasme pour mille, de l’humilité en quantité industrielle et un amour profond et sincère pour ceux et celles qui choisissent de me faire confiance. Je sais que je suis à la bonne place. MA place. Celle que je n’ai pas volée, celle où m’a menée ma vie riche en apprentissages et en adversités, celle faite de ravissement devant la perspective de tout ce que je vais continuer à apprendre et qui fera de moi une meilleure humaine. Et qui fera de vous, je l’espère, un auditoire heureux.