J’ai acheté mon «fils», John Mel&Camper, à la suite d’une fin de semaine au chalet, duquel j’étais partie en me disant: «C’est donc ben du trouble, un chalet! Si j’avais une van, je pourrais squatter le terrain des chalets de tous mes copains!» J’étais loin de me douter que cette idée, lancée un peu en l’air, aurait chamboulé complètement mon existence, quatre ans plus tard. Je me suis procuré ledit véhicule deux mois après avoir eu ce flash et un mois avant de faire la connaissance de mon amoureux, Antoine, qui a tripé autant que moi sur ma nouvelle acquisition.

À deux, on s’est mis à organiser le roadtrip d’une vie, duquel on est revenus depuis quelques semaines déjà (snif!). Sept mois, 35 000 km, cinq pays, deux ou trois larmes et presque un milliard de photos mentales.

Au cours de ce périple, j’ai beaucoup appris sur moi-même. Je me suis rendu compte que je pouvais me contenter de peu – moi à qui on a toujours reproché d’en vouloir trop, de ne jamais être satisfaite. J’ai appris à lâcher prise et à «faire avec» ce que la route et la journée m’apportaient. J’ai fait davantage appel à mon intelligence émotionnelle lorsque mon amoureux et moi avions des différends.

Mon plus bel apprentissage, je l’ai eu dès le jour 1. J’ai fait la connaissance d’un nouveau mode de vie, avec lequel je me suis sentie entièrement en harmonie. Chaque parcelle de mon corps et de mon âme était satisfaite. J’ai su que je venais de trouver la façon de voyager qui répondait à tous mes besoins, que je pourrais vivre dans ma van à temps plein et faire un 180° dans ma propre vie.

Mais, sachez-le, ce mode de vie est à des années-lumière de ce que les influenceurs veulent nous vendre sur les réseaux sociaux. La #vanlife a beau être devenue une tendance, les photos qui l’accompagnent reflètent rarement la réalité. C’est faux de penser qu’on part en van comme on part en vacances. Oui, la vie de van est synonyme de liberté et de grands espaces, mais elle nécessite aussi du travail et cause du stress. Choisir la vie de van, c’est accepter de vivre avec une épée de Damoclès en permanence au-dessus de la tête. Car, à moins d’avoir les moyens de s’offrir un modèle récent, on roule dans des vans qui ont souvent de l’âge: un ennui mécanique peut donc survenir à tout moment. Certains disent même qu’on double nos problèmes: d’un côté, il y a ceux de la mécanique automobile, de l’autre, ceux de l’habitation en VR.

Opter pour la #vanlife, c’est aussi ne jamais savoir où on dormira le soir. Bien que la légende urbaine veuille que les magasins à grande surface laissent les gens s’y stationner pour la nuit, sachez que ces endroits se font de plus en plus rares. Peu importe où on se gare, on risque toujours de se faire expulser de l’espace choisi par le «toc-toc-toc» nocturne d’un policier ou d’un fauteur de troubles.

La vie de van, c’est avoir les cheveux (très) sales 98 % du temps et accepter que la seule hygiène personnelle «à jour» est celle de notre bouche! Mais surtout, c’est accepter de TOUT partager avec l’être aimé, soit l’intimité, la face luisante, les odeurs, le pipi du matin, la bulle, le «pu-de-jardin-secret-pantoute».

«Mais elle est donc bien décourageante, elle?» vous dites- vous peut-être. Non, pas tant. Je tente seulement d’enlever quelques filtres Instagram et de brosser un portrait juste de ce mode de vie. Malgré tout, je ne pourrais plus me passer de ma van. Même que ces lignes-là, j’aurais aimé ne jamais les écrire. Elles sont empreintes d’une grande fierté, d’un sentiment de réussite, mais aussi d’une profonde tristesse. Écrire ce papier, c’est accepter la finalité du plus grand rêve de ma vie. Grâce à notre John Mel&Camper, on a parcouru le Belize, le Guatemala, le Mexique, les États-Unis et, bien sûr, le Canada. Grâce à lui, on s’est permis de ne plus avoir d’agenda et de se recentrer sur notre essence. On a tout laissé derrière… ON L’A FAIT!

Les gens nous disent souvent que mon conjoint et moi on a été courageux, mais je ne suis pas d’accord. On n’est pas courageux; on s’est seulement offert le plus beau des cadeaux pour nos 40 ans: du temps. Quand on fait l’éloge de mon courage, je raconte la fois où j’en ai en totalement manqué, sur une route large comme la van, en Baja California. Au bord d’un précipice, j’ai été complètement paralysée par la peur, incapable d’avancer. J’ai hurlé comme dans un film d’horreur. Je suis sortie de la van en pleine crise de panique et j’ai crié à Antoine: «Je ne suis pas prête à mourir tout de suite! Vas-y, meurs, toi, si c’est ce que tu veux!» Bon, dans les faits, la route n’était pas si étroite que ça, et j’ai réussi à y conduire sur le chemin du retour, mais sur le coup, je dois avouer que j’avais perdu tous mes repères!

Grâce à ma van, j’ai visité certains petits villages guatémaltèques où aucun touriste n’avait posé le pied depuis des années. J’ai fait des rencontres qui m’ont fait chaud au cœur (allô, Renaldo!). J’ai dansé avec des enfants mexicains dans des parcs, j’ai plongé dans la plus douce des cascades, au milieu de la forêt bélizienne. J’ai dormi gratis dans les rues de Manhattan et de Las Vegas – oui, je fais ma fraîche! J’ai cueilli des cerises dans l’Ouest canadien (un rêve d’ado enfin réalisé). J’ai enlacé un séquoia géant à qui j’ai confié tous mes soucis, lui demandant de me remplir le cœur de zénitude pour le reste de mes jours. Grâce à la van life, j’ai compris qui j’étais réellement, en apprenant à vivre autrement. Maintenant, je sais comment me connecter à l’essentiel, je laisse aller le superflu et les tracasseries inutiles. Je suis une «vaneuse»!

On peut suivre les aventures d’Antoine et Mélanie sur leur page Facebook On est où? par Mélanie Leblanc.