Lorsque mon épiderme aguerri d’adulte (presque) accomplie a mis sur pied une campagne de sabotage du type crise d’adolescence en marquant ma peau de petits boutons et rougeurs, j’ai d’abord prêté peu d’attention aux symptômes, croyant me heurter à une simple et banale poussée d’acné. Sans soupçonner une inflammation cutanée, j’ai entrepris ma routine zéro défaut habituelle: pointer du doigt les hormones, le stress, le changement de saison et même une hypothétique réaction allergique à mon nouvel amoureux, me badigeonner de soins anti-imperfections combinés à un rituel strict d’exfoliation et de masques, et m’armer de patience en espérant que la crise passe rapido-presto. Après plusieurs semaines, voire mois, de boutons, enflures, rougeurs et démangeaisons se logeant de façon permanente sur mon visage et décuplant autour de mon nez et ma bouche, force était d’admettre que la situation n’avait rien d’habituelle.

La dermatite périorale

En fait, ces imperfections persistantes témoignaient d’un trouble cutané qui nécessitait une attention médicale, un détail qui m’échappait complètement avant que, par hasard, un ami médecin m’éclaire. Il lui a suffi d’un rapide coup d’œil et de quelques questions pour qu’il dresse son diagnostic: une dermatite périorale. Cette éruption inflammatoire qui cerne particulièrement la bouche, le nez et parfois les yeux s’apparente à l’acné et à l’eczéma et se veut relativement facile à diagnostiquer et à traiter. Le hic? «La cause, vraiment, est inconnue,» révèle le Dr Ari Demirjian, dermatologue à la Clinique de Dermatologie Privée de Montréal et professeur adjoint à la faculté de médecine de l’Université McGill. «On détient des théories, on soupçonne certaines choses, mais pourquoi exactement [la dermatite périorale] survient, on l’ignore encore.» Outre les produits à base de cortisone qui peuvent aggraver l’inflammation, les experts soupçonnent aussi le fluor que l’on retrouve dans le dentifrice ou le rince-bouche, ainsi que certains soins cosmétiques et écrans solaires minéraux comme représentant de potentiels facteurs de déclenchement… Autant dire la presque totalité de notre trousse beauté. Et comme les causes restent nébuleuses, impossible de mettre la main sur une marche à suivre miraculeuse qui promet avec certitude d’éviter l’éruption puisqu’elle n’existe tout simplement pas (encore, on l’espère!).

Ma routine beauté – qui consistait à superposer une panoplie de soins basé sur la technique du layering – n’ayant guère changé depuis plusieurs mois, les probabilités d’identifier correctement le (ou les) produit coupable étaient quasiment nulles. Pour traiter l’inflammation, et m’aider à récupérer ma peau pré-dermatite, mon médecin m’a donc prescrit deux mois d’antibiotiques et, parallèlement, m’a fortement recommandé de renoncer complètement à mon rituel de soins et maquillage pour la durée du traitement. COMPLÈTEMENT. Ça signifie aucun hydratant, sérum, nettoyant, exfoliant, cache-cerne, fond de teint ou autre petit pot miracle. Idéalement, on laisse tous nos flacons de côté pendant un ou deux mois afin «de ne pas re-stimuler le processus,» explique le Dr Demirjian, «puis on réintroduit les produits un par un afin voir si l’inflammation se répète.»  Ainsi, c’est peau nue que j’ai plongé dans ce nouveau chapitre cutané dont je tire aujourd’hui plusieurs leçons.

L’épiderme qui met la main à la pâte

Dire adieu à notre routine de soins du jour au lendemain s’impose, a priori, comme une rupture carrément anxiogène. Sans nettoyant, exfoliant ou crème hydratante, j’imaginais le pire: une peau affligée de points noirs, ridules, plaques de sècheresse ou encore d’excès de sébum. À ma grande surprise ce fut tout le contraire: à l’exception des imperfections qui tardaient à s’éclipser et d’une mine moins éclatante, ma peau est restée unifiée et équilibrée, même plusieurs mois après l’arrêt des soins! Il semblerait que mon épiderme ait rétabli un cycle de régénération naturel sans l’aide de mes soins chouchous. «Notre peau peut très bien survivre toute seule,» précise le Dr Demirjian, qui ne manque pas au passage de souligner l’importance d’inclure un écran solaire à notre rituel beauté et d’appliquer un hydratant lorsque les températures chutent. Une routine grandement allégée s’invitait donc dans ma vie.

Une trousse réduite à l’essentiel

En repartant à zéro, j’ai fait peau neuve et je mobilise maintenant mes efforts afin d’éviter une nouvelle inflammation, une démarche qui rime pour moi avec une routine beauté réduite à l’essentiel. «Certaines études démontrent que plus on applique de couches de produits sur la peau, plus les probabilités d’aggraver la situation augmentent,» remarque le Dr Demirjian. Après avoir jeté une panoplie de produits à la poubelle – dont plusieurs périmés depuis trop longtemps –  je jure fidélité à une mini sélection de soins qui s’accordent avec mon épiderme. Si je dois impérativement élargir ma trousse, je passe au peigne fin la formulation du produit et je consulte les avis en empruntant un processus de sélection digne des expériences les plus VIP. Je fuis particulièrement les cosmétiques contenant du petrolatum, de la paraffine ou du myristate isopropyl, trois ingrédients que le Dr Demirjian désigne comme étant d’hypothétiques déclencheurs à l’origine de l’éruption. Enfin, j’incorpore un seul nouveau soin à la fois de manière à pouvoir rapidement intercepter une éventuelle réaction. En définitive, ce désagrément m’a ramené en tête une réalité parfois difficile à accepter: cette peau que je triture et abîme à grand coup de perçage de boutons et de couches de produits à la composition douteuse est et restera toujours l’une des premières choses que les autres verront de moi. Il est donc primordial de la chérir et la chouchouter par le biais de soins de qualité.

Mise à nue

Sans fards ni soins, impossible de camoufler ses imperfections derrière un teint ultra grimé. J’appréhendais une dégringolade d’estime personnelle, mais cette mise à nue épidermique a plutôt déclenché un processus d’acceptation de soi. Considérant que de me tapir dans mon appartement pour une durée indéterminée n’était pas une option viable (l’éruption s’est pointée le bout du nez plusieurs mois avant le début de la pandémie), chaque jour, traitement oblige, un nombre grandissant de gens me découvraient sans fard ni artifice. Néanmoins, ma peau au naturel n’a suscité aucune remarque, commentaire désobligeant ou même, autant que je sache, de jugement. Ce lourd sentiment d’embarras que je trimballais depuis des années et qui m’empêchait d’afficher une mine sans maquillage au boulot ou à des événements professionnels s’est affaibli petit à petit, soufflant un vent de fraîcheur sur ma relation avec le maquillage. Je ne ressens plus le besoin de dissimuler mon visage quotidiennement derrière une abondance de fards. Ma trousse est redevenue une petite source de bonheur dans laquelle je pige avec plaisir, et non plus par peur du regard des autres.

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